Antonin est vraiment heureux de la naissance de sa
petite soeur. Ce ne sont que sourires, câlins et compagnie. Je constate
qu’il existe déjà entre eux une interrelation très riche et très tendre.
En accord avec Jean-Jacques Rousseau, j’ai toujours pensé que les hommes étaient bons par nature.
D’après ce grand Monsieur, c’est la société (et principalement
l’éducation) qui les pervertit et les rend méchants. En observant mes
deux bébés, et cet élan d’affection qu’ils ont l’un pour l’autre, je me
dis que, oui, le petit d’homme est un être d’amour.
Et aussitôt après, je pense aux habitants de Holms,
massacrés depuis plusieurs mois sans que la communauté internationale ne
bouge le petit doigt. Je pense à tous ces enfants, des enfants comme
les miens, bons par nature, qui vivent dans la terreur, et qui ne
connaissent plus que la faim et le manque de soins élémentaires.
Je repense souvent à la scène centrale de Children of men
(film aussi dur qu’il est beau, âmes sensibles s’abstenir) : là où il
n’y a ne serait-ce qu’un enfant, la guerre devrait cesser immédiatement.
Guerre et enfance ne sont pas compatible. En fait, guerre et humanité
ne sont pas compatibles. Puisque l’humanité est bonne par nature !
Comment en est-on arrivé là ?
Comment pouvons-nous laisser la ville de Holms se faire rayer de la carte ? Comment pouvons-nous expliquer à nos enfants, les yeux dans les yeux, que nous laissons faire une chose pareille ?
Depuis le début de l’époque moderne, des philosophes mettent l’accent sur le lien qu’il y a entre une éducation pertinente et respectueuse, et la fin du despotisme
et de ses corrélats : l’ignorance, la haine de l’altérité et le délire
de toute-puissance. Maria Montessori est une de ces philosophes qui
soutiennent que la paix universelle est possible. Elle propose même une
méthode pour y parvenir, sur laquelle elle a travaillé toute sa vie et
qui paraît tenir la route, même un siècle plus tard. Pourquoi ne pas
avoir encore essayé ? Que risquons-nous ? De quoi avons-nous peur ? Ou
bien la paix dans le monde ne serait-elle pas le voeu le plus cher de
nos dirigeants ?
En élevant mes enfants, je pense beaucoup au monde de demain
qui sera le leur et j’exhorte mentalement, de toutes mes forces, l’ONU à
intervenir immédiatement et à faire évacuer de Holms ces milliers de
familles comme la mienne, prises en otage dans ce cauchemar atroce.
Car sinon, que dirons-nous à nos enfants demain ?
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